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L’autre
raison qui devrait pousser votre œil inquisiteur à l’indulgence, c’est le fait
que ces grossières erreurs de français arrivent
même en France. Selon une étude récente, 90 % des mails des entreprises
contiennent au moins une faute d’orthographe. Beaucoup se souviennent aussi, de
la circulaire de novembre 2009 d’Eric Besson, le ministre français de l’identité nationale du gouvernement de
Nicolas Sarkozy, achtung baby à « l’identité nationale »,
qui devait organiser le grand débat sur l’identité nationale justement, elle comportait
une demi-douzaine de fautes d’orthographes. Bon, il faut peut-être comprendre par-là,
que la maîtrise de la langue française ne fait pas partie de l’identité
nationale de la France ! El7aslo.
Restons dans le monde politique. Sachez également que l’on a dénombré une
demi-douzaine de fautes d’orthographes dans le communiqué de presse de la présidence de la République française,
sous Nicolas Sarkozy, publié à l’occasion de la mort de Danielle Mitterrand en
novembre 2011. Décidément, il faut croire que ce mois de novembre ne porte pas
bonheur !

Toujours
est-il, le nouveau billet de 50 000
LL émis par la Banque du Liban n’est pas un chef d’œuvre. On est bien d’accord.
Mais bon, ce n’est pas non plus une catastrophe. Il devait être mis en circulation
le 22 novembre pour commémorer le 70e anniversaire de l’indépendance
du Liban de la France, qu’au moins 1,75 million de Libanais regrettent amèrement
aujourd’hui. Ah mince, elle est peut-être là, la raison de la bourde ! Tout n’est pas mauvais dans ce billet, quand même. Il y a trop de couleurs (mais ça passe). J'aime bien le palais de Bchamoun au
recto (pour ce qu’il représente sur le plan national), ainsi que l’esthétique de l’écriture arabe (masrif lebnan, khamsoun alf lira), le
clin d’œil à l’hymne national (ba7rouhou,
barouhou) et le « drapeau de
l’indépendance » du verso (l’acte de naissance du Liban où figurent
les signatures des hommes de l’indépendance). A l’heure où les « chiffres
arabes » (qu’on utilise dans les pays occidentaux: 0, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9), envahissent tous les
médias libanais d'expression arabe, il faudrait rendre hommage aux services de l’État libanais qui
continuent contre vents et marées, à utiliser les « chiffres
arabo-indiens » (qu’on utilisait autrefois au Liban ; les
chiffres de mon enfance: ٠، ١، ٢، ٣، ٤، ٥، ٦، ٧، ٨، ٩). Il faut quand même rappeler aux médias libanais d'expression arabe, qu'il y a deux décennies, maxi trois, les
chiffres arabes n'étaient utilisés que par
le Parti Social-Nationaliste Syrien (el
hezb souré el 2awmé el ejtimé3é) ! Alors, de grâce, qu'ils
reviennent aux « chiffres arabo-indiens » qui s’associent élégamment et harmonieusement
avec l’écriture arabe.
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Dans un Etat où l'on assiste
à la destruction de l'atmosphère convivial (dégradation de la cohabitation inter-communautaire, islamophobie, christianophobie, racisme, exploitation, appât du gain, obsession de l'argent, insécurité ambulante, règne des milices, stress du travail, des embouteillages, des doubles factures, des interminables chantiers, etc.); des valeurs humaines (refus de soins, trafic d'organes, frais de scolarité et d'université exorbitants) ; de l'héritage démocratique (assassinats politiques, appauvrissement des débats politiques, Parlement autoprorogé, gouvernement démissionnaire, vacance présidentielle en perspective, loi électorale archaïque, limitation des libertés individuelles, censure omniprésente, intimidation); du patrimoine immobilier (démolition systématique des anciennes
bâtisses de Beyrouth, du littoral et de la montagne, pour construire des résidences hideuses et
des maisons grotesques de nouveaux riches ; des biens culturels (abandon des sites archéologiques
libanais, destruction de l’ancien hippodrome romaine de Beyrouth, destruction du port phénicien de Beyrouth) ; des atouts naturels (bétonnage du littoral, défiguration des paysages par les
carrières de sable et de pierre, défiguration des alentours de la
forêt des Cèdres à Arz pour le mariage d’un fils à papa, multiples violations
dans la vallée sainte de Qannoubine, infâme déchetterie de Saïda, infecte fleuve de Beyrouth) ; de l'environnement (abattage massif des forêts pour construire de
la laideur sur des terrains défraichis et se chauffer avec le bois récupéré, mutilation des arbres d’alignement des trottoirs de Beyrouth pour en
faire de ridicules boules décoratives, transformation de 2/3 du sous-sol du
jardin de Geitawi à Achrafieh en parking) ; de la faune (chasse hystérique des espèces locales et des
oiseaux migrateurs, comme l’aigle de Bonelli, une espèce méditerranéenne
menacée, pris pour un aigle espion israélien ; aménagement d’une plage
réservée aux femmes sur le littoral de Tyr qui empêchera les tortues de mer de se
reproduire là où elles sont nées) ; j’en passe et des meilleures, alors
franchement, comment peut-on s’étonner
après que notre pays imprime un billet de banque aussi nase, alors que nous avions
de véritables œuvres d’art jadis ?
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Post-scriptum
D’après
le gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salameh, le mot « indépendance »
a été correctement orthographié. La faute relevée sur le billet reviendrait plutôt
à l’imprimeur. Avouez que nous avons là, une bien curieuse explication !
Non
seulement, on ne sait pas par quelle voie mystérieuse le fichier envoyé par la
Banque du Liban à l’imprimeur anglais, a pu être modifié sans autorisation, ce
qui constituerait une faute grave de la part de l’imprimeur, mais en plus, tout
client d’une imprimerie, même d’un « Copy center », sait que la
procédure d’usage prévoit dès la réception du fichier numérique une sortie papier
que l’imprimeur envoie à son client, pour « correction » justement.
Cette copie temporaire du document final, doit être retournée à l’expéditeur, corrigée,
datée et signée. Sans la mention « Bon à tirer », apposée sur la
copie, aucun imprimeur dans ce monde, aussi insouciant et incompétent soit-il,
ne met ses rotatives en marche pour exécuter la commande de son client. Vous pensez bien, dès qu’il s’agit d’argent, personne
n’est fou. Surtout s’il faut imprimer le document à 50 000 exemplaires ! Il est clair que le gouverneur de la Banque du Liban a présenté au peuple libanais une excuse bidon pour couvrir des fonctionnaires qui n'ont pas fait
leur boulot de contrôle et des artistes qui étaient manifestement en mal
d'inspiration.
En
tout cas, Riad Salameh a décidé quand même de mettre en circulation le billet
en question, comme prévu le 22 novembre. Sur ce point, je suis entièrement d’accord, j'approuve sans réserve cette décision.
Détruire ces billets, maintenant qu’ils sont imprimés, ne sert pas à grand-chose.
A part gaspiller l’argent public ! Pourvu que
le gouverneur financier ait tiré les leçons de cette mésaventure.
Riad Salameh est un brillant économiste reconnu, élu à de multiples reprises et par divers magazines comme meilleur gouverneur de banque centrale au Moyen-Orient, mais pas nécessairement un bon graphiste. Encore une fois, ce n’est pas tant la faute d’orthographe qui est la plus
gênante dans cette histoire, mais la qualité esthétique de ce billet. Sans l'ombre d'un doute, la Banque
du Liban peut faire mieux. Elle l'a longtemps prouvé dans le passé. A bon entendeur, salut !