Nous sommes dimanche soir, 22 novembre. Bruxelles
est bouclée. Les autorités craignent des attaques multiples, comme
celles survenues à Paris le 13. Des opérations de police d’envergure sont en
cours. Elles visent les réseaux terroristes. Pour éviter que des fuites d’infos
par inadvertance, ne servent les esprits criminels qui rôdent dans la ville, la police fédérale demande aux médias de « respecter le silence radio ».
Soit, mais quid des citoyens et quid des réseaux sociaux ?
Brainstorming virtuel pour trouver une idée. D’habitude dans ce genre de contexte, on parle de la pluie et du beau temps. Bon, il fait gris, le froid s’installe en Europe, il va commencer à geler, on a vite fait le tour, rien de passionnant, et après ? Le cœur n’y est pas, même pour la COP21. Désespérés, les internautes belges ont fini par donner leur langue aux chats. Mais justement, hop, elle est là l’idée. Pourquoi ne pas lancer une variante du jeu à chat, ce jeu de poursuite où le poursuivant doit toucher n’importe quelle personne poursuivie, pour s’affranchir de sa mission et inverser les rôles. A vos marques, prêts, partez.
C'est alors que le hashtag
#brusselslockdown est lancé et les chatières sont ouvertes. Bilan
des courses, pas un chat dans les rues de la capitale belge et tout le monde s’est
abstenu d’appeler un chat un chat. Par contre, des hordes de matous et de minous envahirent les
réseaux sociaux, au grand bonheur des amoureux des petits félins. Des chats de
gouttière, des chats de race, il y avait de tout. Des chats faisant le pitre (la palme d'or !), c’est tout un chapitre. Ce fut la
fraternisation, des Siamois côtoyèrent des Persans et des Yorks Chocolats ont
été aperçus avec des Orientaux Shorthairs. Je ne vous dis pas, c’était un
charabia pas possible. Même le très sérieux quotidien belge francophone Le
Soir, a osé illustrer un article intitulé « Menace terroriste à Bruxelles : des opérations policières
sont en cours », avec le minois d’un chat bien planqué au-dessous d’une
planche, au regard louche, mais aux aguets. Il
n’y a pas à dire, cette idée de chat(leurre) a fait beaucoup de bien. Les
Belges ont trouvé la parade : avec des chats et un grain, le stress se réduit
comme peau de chagrin.
Et pendant ce temps, les chats fourrés au palais
de justice, attendaient que les chiens policiers attrapent ces rats au cœur avare
et à l’esprit mesquin, pour les mettre derrière les barreaux. Touchée par l’extraordinaire
coopération des médias et des citoyens belges, la police fédérale est allée jusqu’à remercier avec beaucoup d’humour
aussi « les chats qui nous ont aidé
hier soir », en leur offrant un grand bol de croquettes. Sacrés
Belges ! Pas de doute, seuls l’amour
du prochain, des êtres et des bêtes, les chats et les chiens en tête, et l’humour, dans toutes ses variantes,
la satire et le sarcasme en premier, sauveront
le monde de la déshumanisation des
fanatiques, qui, comme on dit au Liban, ne sont même pas capables de sourire devant un irrésistible « rghif el sokhin »,
le pain (libanais) chaud, encore moins à cette tendre histoire belge.
Comme on m'a déjà pris pour un Belge, plus d'une fois, et puisque chat échaudé craint l'eau froide, je serai Belge pour le reste du mois. Et pour le prouver voici mon avatar, Chat potté, dont les gros yeux ronds
ont fait craquer un ogre et des millions de gens. Ce personnage est inspiré des contes
franco-italiens de Giovanni Francesco Straparola et de Charles Perrault. Dans
la version adaptée au cinéma par les studios de Steven Spielberg (2004), il est
chargé par le roi Harold, qui règne sur le royaume de Fort Fort Lointain, d’assassiner
son gendre, Shrek qui vient d’épouser la princesse Fiona. Défait mais gracié,
Chat potté se considère dès lors redevable à l’ogre de lui avoir sauvé la vie. Il
devra affronter tout seul les gardes venues arrêter son ami. La suite de l’aventure
dans Shrek
2, l’un des plus gros succès de l’histoire du cinéma, pour mettre un peu de douceur dans ce monde de brutes.