
Voyons
un peu. Dans un droit de réponse publié par le quotidien Al-Akhbar le 11 juin,
la municipalité de Beyrouth prétend que « la
construction du parking n’affectera nullement le jardin ». Bien au
contraire, dira Bilal Hamad, le président
du Conseil municipal de Beyrouth dans Annahar du même jour. « Le
jardin des Jésuites restera intact. Après sa restauration il deviendra plus
beau qu’il ne l’est aujourd’hui. » Des foutaises, oui ! C’est
typique, le genre de déclaration, surtout quand c’est en gros titre (comme ça
était repris par certains médias et plusieurs personnes sur facebook), qui induit
magistralement en erreur. Le projet de parking est plus que jamais à l’ordre du
jour, comme le prouve la suite des déclarations de Bilal Hamad, et aura des
conséquences graves, que j’ai exposées en détail dans mon article « Un parking en plein cœur d'un jardin
d'Achrafieh : le dernier délire (bis) de la municipalité de Beyrouth ».
« Nous
avons décidé de construire 4 à 5 étages souterrains pour 600 voitures. » Enfin, des chiffres ! Disons d’emblée, que les deux
chiffres du président de la municipalité de Beyrouth sont en contradiction avec
ceux avancés par les membres du Conseil municipal. Hagop Terzian, conseiller municipal, a évoqué dans l’Orient-Le
Jour du 8 juin, un parking de 700 places. Rachid
Achkar, responsable du Comité du transport au Conseil municipal de
Beyrouth, a quant à lui, annoncé dans l’Orient-Le Jour du 12 juin, un parking de
quatre niveaux. Il faudrait quand même savoir, c’est 600 ou 700 places, sur 4
ou 5 niveaux ? Connaissant les pratiques et les mentalités libanaises, on
peut même s’attendre à bien davantage. Mais enfin, le problème ne réside pas dans le nombre de places, autant qu’il est
dans l’existence du parking lui-même. Pour la suite, je me baserai sur les
chiffres de M. Terzian et de M. Achkar, mon instinct me dit que ceux de M. Hamad,
ont été avancés dans une tentative ridicule de minimiser l’impact du parking
sur le jardin ! Ma3lé.

Rachid
Achkar nous rassure, « Le jardin sera
refait, en plus beau. Les arbres ne seront pas jetés mais replantés. » Quelles
foutaises. Mais quoi encore ! Arracher des ficus de plus de 50 ans, pour les stocker 4 ans je ne sais où, puis les replanter au dessus d'une dalle en béton et faire croire aux gens que la transplantation
réussira, est une couleuvre que même des citadins qui n’ont pas la main verte
auront du mal à avaler. Il faut donc arrêter de se foutre de la gueule des gens,
et surtout de leur mentir. Au-dessus
d’une dalle en béton armé de petits arbustes remplaceront les grands arbres. Avec
une réalité aussi triste, comment la municipalité de Beyrouth ose prétendre qu’elle
cherche à « augmenter la surface des
espaces verts à l’intérieur du jardin », alors que son projet bétonnera 2/3
du sous-sol de cet espace vert, ce qui conduira ipso facto à arracher les
grands arbres existants, pour les remplacer par de plantes de petites tailles ?
Mystère et boule de gomme. Que la
municipalité de Beyrouth cesse déjà de tailler sévèrement les arbres existants,
pour en faire des arbres ridicules d’ornement, et les laisse s’épanouir
comme il se doit et comme il se fait dans toutes les villes occidentales. Bala laf wou dawarann, par ce projet de parking, la municipalité
de Beyrouth transformera ce magnifique jardin de cyprès, de sapins et de ficus
en une ridicule jardinière géante où quatre primevères, trois géraniums et deux
pensées se battront en duel. Dans une ville où il fait autour de 30° et même plus, six
mois l’année, avouez que la municipalité de Beyrouth n'a vraiment pas peur du
ridicule. Alors, vous comprenez mieux maintenant pourquoi la prétention de
Bilal Hamad, « Le jardin des Jésuites
restera intact. Après sa restauration il deviendra plus beau qu’il ne l’est aujourd’hui
», est un non-sens grotesque !

Et
malgré ce peu de sérieux et cette opacité, autour d’un projet aux conséquences
aussi graves, Rachid Achkar, Monsieur Transport de la municipalité, a le culot
de nous balancer : « Si une
partie de la population s'oppose à ce projet, c'est qu'elle a une vue très
courte de l'avenir. Pour notre part, nous faisons de la planification, nous
travaillons sur le long terme. Le projet sera réalisé, nous ne sommes pas
obtus, mais nous avons l'obligation de respecter les plans de développement.
Nous faisons ce que nous pensons être le meilleur pour la ville. » De
la planification, du long terme, un respect des plans de développement et le
meilleur pour la ville ? Enno bass
yé7ké ! Palabres au pays des palabres ! C’est nous qui avons une « vue très courte de l’avenir » ?
La municipalité de Beyrouth creuse
davantage son ridicule, en négligeant la répercussion de la mutilation du
jardin de Geitawi -par le remplacement des grands arbres avec de minables
plantes- sur la santé de tous les
Beyrouthins, notamment les Achrafiotes. Comment des responsables publics,
qui prennent une décision aussi grave, peuvent-ils ignorer que Beyrouth fut déclarée la 176e ville la plus
polluée au monde selon une étude de l’Organisation mondiale de la Santé
(OMS), menée en 2011 et portant sur 1082 villes ? La2, ma3jou2inn el chabeb. Dans une ville où les habitants ne
disposent que de 0,1 million m² d’espaces verts -24 millions pour les Parisiens
et 64 millions pour les Berlinois-, dans une ville où le plus grand espace
vert, le Bois des Pins (un parc plus grand que le jardin des Tuileries et le
jardin du Luxembourg à Paris !), reste toujours fermé au public alors qu’il
aurait dû ouvrir en 2002, el chabibé veulent
plus d’autoroutes et de parkings ! Pathétique. Rappelons que la pollution
atmosphérique ignore les frontières
administratives et communautaires. Elle est à l’origine ou aggrave les
cardiopathies, les cancers du poumon, les infections des voies respiratoires et
l’asthme.

1. Pourquoi diable,
aller défigurer un jardin public et arracher des grands arbres, alors qu’on
peut construire des bâtiments-parkings avec quatre sous-sols et dix étages,
entièrement consacrés au stationnement des voitures sur les parcelles
appartenant à la municipalité de Beyrouth, dont l’une se situe non loin du
jardin de Geitawi ?
2. Pourquoi la
municipalité de Beyrouth ne signe pas de partenariats avec les promoteurs de la
ville, prenant à sa charge, moyennant une indemnité pour les propriétaires, la
construction de parkings souterrains sur des parcelles privées qui sont déjà
dédiées à la construction, et qui seront mis en vente et en location, aux
non-résidents des futurs immeubles ?
3. Pourquoi ne pas
utiliser l'ensemble de la voirie, qui est dans le domaine public, pour
construire des parkings souterrains ?
Au total,
je pense que la nouvelle équipe municipale de Bilal
Hamad devrait renoncer à créer un parking dans le jardin de Geitawi, comme l’a
fait avec beaucoup de sagesse l’ancienne équipe de la municipalité de Beyrouth, en 2009, au sujet du
jardin de Sanayé3. Le Conseil municipal, doit se pencher sérieusement sur
les solutions alternatives, pour régler les problèmes de stationnement, et
abandonner définitivement l’idée farfelue de mutiler le peu d’espaces verts que
nous avons pour en faire de hideux parkings.
Réf.
Un parking en plein cœur d'un jardin d'Achrafieh : le dernier délire (bis) de la municipalité deBeyrouth
(Art.152) par Bakhos Baalbaki
Fête de la musique au jardin de Geitawi le vendredi 21 juin, et pourquoi pas ? (Art.153) par
Bakhos Baalbaki
Rassemblement contre la démolition du jardin des Jésuites, le samedi 15 juin à 16h par Beirut Green
Project.
Une autoroute en plein cœur d’Achrafieh : le dernier délire de la municipalité de Beyrouth (Art.141) par Bakhos Baalbaki