Qu’elle
est fascinante la nuit !
A
l’heure des « fayadanèt »,
cet
état de grande excitation cérébrale,
l’extase
(ré)créative de tout écrivain.
A la lumière d’une pleine lune,
sous les hurlements inaudibles d’une meute de loups,
partis
des vallées profondes du Mont-Liban,
pour
hanter mon cortex et le fin fond de ses sillons.
Pendant
que la majorité des citoyens dorment sereinement,
se
remettant de leur labeur, entre les mains des autorités d’un Etat ronflant.
A l’heure où les
esprits diaboliques rodent dans les rues de Beyrouth,
et
les chiens errants fouillent les poubelles de la ville.
Certains
mecs rêvant des poitrines qu’ils ont croisées dans la journée,
recalculent le montant des intérêts après le dépôt de cash
qu’ils
ont amené à la banque dans un sac en plastique.
Certaines
femmes mettant au point consciencieusement, alors qu’elles dorment,
des
plans pour faire cuire à petit feu les mecs qui salivent
sur
leur gorge opulente, comme ce pauvre chien de Pavlov,
jetent un coup d’œil sur Facebook, réflexe furtif, esprit éveillé et yeux
fermés.
Un
homme et une femme, n’en finissent pas de s’ébattre,
se
sentent pousser des ailes jusqu’au 7e ciel de l’immeuble Abou
Diyab.
Au-dessous
d’eux, un insomniaque dubitatif, vautré dans son canapé,
que les ébats honteux déchirent les tympans,
tente de couvrir les frasques de ses voisins en écoutant
tente de couvrir les frasques de ses voisins en écoutant
une
nonne relatant l’embouteillage lucratif des Dracula de Da3ich.
De
l’autre côté, derrière la pharmacie Ballout, 50 mètres à droite,
au
rez-de-chaussée, cigare grotesque et sourire narquois,
le gorille d’un grassouillet de la nation, qui dort comme un loir,
maintenant que son mandat s’est autoprorogé et son salaire est assuré,
le gorille d’un grassouillet de la nation, qui dort comme un loir,
maintenant que son mandat s’est autoprorogé et son salaire est assuré,
bluffe
ses congénères de poker avec des cartes disparates.
Et
à l’autre bout de la ville, les esprits démoniaques aux mains habiles,
les
horlogers de ce qu’est devenue la Suisse de l’Orient,
relient
méticuleusement les fils de leur joujou et peaufinent leur plan funeste pour un lendemain qui déchante.
Au-dessus
du dernier épicier de ce quartier convoité, un gang organisé,
emballe
un arrivage de marijuana bio fraichement séchée,
en
mangeant 3arouss halloum et en buvant
un chaï doux comme le miel.
Sur
l’appartement du palier, des yeux rouges de jalousie,
et
une testostéronémie qui crève le plafond,
font
une adaptation libre du Loup et l’Agneau.
Les
fêtards et les têtards de la nuit se dispersent selon le goût, sucré ou salé,
pour
les palais snobinards, sashimi de
Sushi Bar, à l'addition bien salée,
quant
aux autres, foul wou tawéb3o chez Abou André ou kafta à la braise chez Abou Koko,
alors
que les fidèles knéfistes se retrouvent en milieu aseptique chez See Sweet.
Et
quelque part, dans un vieil appart, ajar
adim wal7amdou lellah wali oumara2ou el7arbi,
la
lumière est encore allumée au cinquième.
Deux
gars concoctent, mijotent et cuisinent,
une
voix onctueuse, une mélodie veloutée et des images savoureuses,
ils
font oublier durant un laps de temps,
qu’une
lutte s’engage au beau milieu de chaque nuit,
entre
les esprits diaboliques et les âmes artistiques.
Ce
n’est qu’à l'aube qu’on saura qui a bien pu l’emporter.
En
attendant, Shéhérazade mon amour,
« Rendez-vous
ici, demain, même heure. »
Il
suffit de peu pour embellir la vie.
Et
pourtant, dans notre Liban d’aujourd’hui,
ce
peu est un luxe que beaucoup ne peuvent plus s’offrir.
Sound
by OAK
Directed by Tony H. Koury