Il n’y a pas qu’en
Arabie saoudite et en Iran qu’il ne fait pas bon de naitre femme encore en 2014 ! Bienvenue au Brésil. Oubliez pour l’instant la
salsa, la samba et même toute la beauté du carnaval de Rio de Janeiro, ses spectacles de rue et
ses exubérances. La réalité vient d’être ternie par un sondage qui tombe mal,
très mal, et ceci pour diverses raisons.
D’abord,
parce qu’il intervient huit mois après le vote d’une loi protégeant les Brésiliennes des violences sexuelles, et qui prévoit pour celles qui en sont victimes, entre autres, la gratuité des soins
ainsi qu’un soutien psychologique et la mise à disposition de la pilule du
lendemain pour éviter toute grossesse qui pourrait en résulter. Ensuite, parce
que le Brésil n’est pas un pays
ordinaire. Plus de 200 millions d’habitants, 6e puissance
économique mondiale, quintuple champion du monde de football. Le pays de « l’ordre et du progrès », selon
la devise nationale empruntée au philosophe française Auguste Comte, s’apprête à accueillir au mois de juin la 20e Coupe
du monde, évènement phallocratique par excellence. Enfin, parce que le Brésil est l'un des rares pays de la
planète qui sont dirigés par des femmes, Dilma Rousseff.
Et
voilà qu’on apprend qu’un sondage
portant sur 3 810 personnes, ce n’est quand même pas rien !, représentatives
de la société brésilienne a priori, montre que près des deux-tiers des Brésiliens, ou presque, hommes et femmes confondus, affirment que « si les femmes se comportaient mieux, il y aurait moins de viols » (58,5
% des sondés). Pire encore, ils considèrent
que « les femmes portant des
vêtements qui laissent voir leur corps méritent d’être violées » (65,1 %). Notez bien ce « méritent ». Du jamais lu de mémoire de salafistes et de mollahs. Enfin, pas au niveau populaire et pas à une si grande échelle ! Bon, il faut
remarquer par déduction aussi que 6,6 % des sondés semblent penser -oui
normalement on est censés avoir deux petites couilles et un grand cerveau à la naissance,
donc les bourses n’empêchent pas de penser- que le viol des Brésiliennes n’est
pas lié à la tenue des femmes. Il y a une lueur d’espoir tout de même. C’est tout
simplement hallucinant !
Les
résultats de ce sondage ont provoqué la
colère des Brésiliennes qui ont lancé la campagne « ne mérite pas d’être violée » sur facebook sous le hashtag #NaoMerecoSerEstuprada et ceci à l’initiative d’une jeune militante brésilienne (qui est peut-être d’origine libanaise d'après le nom) : Nana Queiroz. Il faut savoir par ailleurs, que le nombre de viols au Brésil a augmenté de 18 % ces dernières années. Plus de 51 000 femmes sont violées par an, soit une toutes les dix minutes, et c'est sans compter celles qui n'osent pas le déclarer.
A l’occasion de la Journée de la femme, j’avais dit et j’ai été mal compris d’ailleurs, que la loi, qui est évidemment nécessaire dans certains domaines, n’est absolument pas une panacée, pas seulement pour protéger les femmes des violences conjugales et sexuelles, mais dans tous les domaines. Non mais, que peut faire une loi contre l’instinct primitif d’un mâle dont la testostéronémie crève le plafond, qui à la vue d’une femme en jupe moulante ou avec un décolleté plongeant, ressent la vapeur de ses couilles en ébullition lui monter à la tête, au point de ne plus penser qu’à prendre par la force ce qu’il ne pourra jamais obtenir par le consentement ? Pas grand-chose. Il faudrait 1001 lois pour cela. Quoique, en y réfléchissant bien, je propose à Dilma Rousseff de faire voter en référé quelques lois pour faire face à la pulsion dangereuse de certains de ses compatriotes.
Primo,
lancer un programme de stérilisation obligatoire
des hommes dérangés par « les femmes
portant des vêtements qui laissent voir leur corps ». Tenez à propos, il
serait judicieux de vérifier par une enquête approfondie que les Brésiliens
n’abusent pas de baïyed el ghanam, les testicules de mouton, comme au Liban. On ne sait jamais ! Remarquez ce n’est
pas si dégueulasse que ça, avec toum wou
7amoud. Enfin, n’importe quoi avec de l’ail et du citron devient mangeable,
même les choux de Bruxelles.
Secundo,
rembourser l’achat de poupées gonflables pour
les hommes gênés par « les femmes
portant des vêtements qui laissent voir leur corps » et les godes pour les nanas importunées par « les femmes portant des vêtements qui
laissent voir leur corps », sachant qu’un gode est plus fidèle qu’un
coureur de jupons nase, voir plus efficace aussi, et rendra sa propriétaire
plus indulgente à l’encontre de ses semblables mieux foutues. Hélas, ce sont deux-tiers des sondés,
hommes et femmes confondus, qui trouvent que « les femmes portant des vêtements qui laissent voir leur corps
méritent d’être violées ». Même les femmes, vous vous rendez compte ?
Tertio, imposer le port des œillères aux hommes qui ont les yeux qui trainent sur «
les femmes portant des vêtements qui laissent voir leur corps » et le niqab aux femmes importunées par « les femmes portant des vêtements qui laissent
voir leur corps ». Et dites-moi pourquoi pas, hein ? Des catholiques et des protestants en œillères et en niqab seraient donc « un meilleur comportement qui pourrait diminuer le nombre de viols », à en croire les sondés brésiliens, c'est vraiment le délire.
Si mes trois
propositions paraissent farfelues aux yeux de certains, personnellement, je les
trouve moins choquantes que l’ignoble révélation de ce sondage. On peut ne pas
approuver certaines tenues de la gent féminine. Après tout, chacun
est libre d’être, de croire et de s’exprimer comme il l’entend.
Mais
de là, à justifier le viol des femmes parce
qu’on n’est pas fichu de contrôler ses pulsions bestiales, c’est un crime
abominable. Il faut une « refonte » de la société et un « reformatage »
des mentalités aussi bien masculines que féminines, pour « fabriquer »
des êtres plus épanouis, plus tolérants et plus respectueux des libertés
fondamentales d’autrui. Aujourd’hui, les
sociétés modernes, au Brésil comme au Liban et ailleurs, fabriquent beaucoup de gens frustrés, qui expriment leur frustration
dans la société par diverses formes de fanatismes. Tenez, une dernière chose avant que je n'oublie, il serait aussi intéressant de savoir combien de Libanais pensent que « les femmes portant des vêtements qui laissent voir leur corps
méritent d’être violées » ?