dimanche 16 octobre 2016

Une tournée en Palestine pour le film « Lebanon Wins The World Cup » dont une projection à Jérusalem (Art.393)


Il y a des sentiments de joie qui pourraient apparaître quelque peu surréalistes mais qui marquent les individus et les sociétés pour un moment. Comme par exemple celui d'ouvrir une parenthèse culturelle, pas cultuelle, sinon les sentiments seraient réalistes , alors qu'on est plongé dans des situations inextricables de la vie quotidienne, d'une guerre sans fin ou d'une occupation militaire, et qu'on tente d'y échapper pendant un laps de temps, sachant pertinemment qu'on va y replonger mais avec une once d'espérance. Bref, c'était le pain quotidien des Libanais d'hier, c'est celui des Syriens de demain et des Palestiniens de toujours.


Voici donc dans quelle perspective l'ONG « Film Lab Palestine » a donné ce weekend le coup d'envoi de la 3e édition de son festival « Aïyam cinama2iyat », les Journées du Cinéma. Au programme, 82 films arabes et internationaux qui seront projetés entre le 15 et le 21 octobre.

Amis, visiteurs, lecteurs et cinéphiles, j'ai le plaisir de vous annoncer que le documentaire « Lebanon Wins The World Cup », réalisé par Tony ElKhoury et Antony Lappé, fait partie de la sélection palestinienne. Inutile de vous dire à quel point tous ceux qui ont travaillé sur ce projet, moi compris, sont heureux et flattés par cette tournée cinématographique en Palestine. Pas parce que ces Journées du Cinéma constituent un grand festival du genre. Nos motivations sont ailleurs.

Pour les comprendre, il faut d'abord se souvenir du pitch de ce court-métrage qui a remporté deux fois le prix du Best Documentary Short aux festivals du film de Varsovie (Pologne) et de Santa Barbara (Etats-Unis).

Le film libanais, qui a été réalisé avec une contribution américaine, raconte l’histoire de deux vétérans libanais, Edouard, un combattant aguerri chrétien, et Hassan, un guérillero intellectuel musulman, engagés dans des camps opposés durant la guerre civile libanaise. Les deux hommes se préparent la veille du Mondial de football de l’été 2014, à soutenir leur équipe favorite, le Brésil. Ce tournoi leur donne une occasion de se remémorer à la fois, des matchs inoubliables de 1982, alors que l’armée israélienne encerclait Beyrouth, et des batailles décisives de 1975, comme celle des Grands hôtels.

Ceci étant dit, nous sommes heureux et flattés de sa projection en Palestine pour diverses raisons.

Primo, parce que Lebanon Wins The World Cup, qui évoque la guerre libanaise à laquelle des « Palestiniens du Liban » ont participé, sera projeté aux « Palestiniens de la Palestine », qui ont eux aussi, comme les Libanais, une grande passion pour le football, tant pour le Brésil que pour l'Allemagne, le thème du film en arrière-plan. 

Secundo, parce que Lebanon Wins The World Cup, qui aborde la réconciliation islamo-chrétienne et le pouvoir de pardonner, constitue un élément important de cette bouffée d'espérance que j'ai évoquée précédemment et dont on a le plus besoin au Moyen-Orient.

Tertio, parce que nous sommes des orientaux sentimentaux. Savoir que ce court-métrage sera visionné dans une ville aussi mythique que Bethléem -là où Jésus, le fils de Dieu pour les Chrétiens et un prophète pour les Musulmans, serait né- et surtout dans la légendaire Jérusalem -cette ville trois fois sainte, vénérée a la fois par les Juifs (à cause du Mur des Lamentations, vestige du temple de Jérusalem, construit par le roi Salomon, pour abriter l'Arche d'alliance, le coffre qui contient les Dix commandements donnés par Yahvé à Moise sur le mont Sinaï ; il fut réalisé avec des architectes et des maçons, envoyés par Hiram, le roi phénicien de Tyr, avec du bois de cyprès et de Cèdre du Liban ; il sera détruit par les armées de Babylone et de Rome), par les Musulmans (à cause de la mosquée Al-Aqsa, bâtie à l'emplacement même d'où Mahomet, le dernier des prophètes pour l'islam, est venu de La Mecque, lors d'un voyage nocturne, et est monté aux sept cieux, pour rencontrer Allah et tous les prophètes qui l'ont précédé, avant de retourner chez lui) et les Chrétiens (à cause de l'église du Saint-Sépulcre qui renferme le tombeau de Jésus de Nazareth, lorsqu'il a été déposé de la Croix, où a eu lieu la résurrection du Christ trois jours après sa mise à mort)- nous remplit de fierté, sans que l'on sombre dans le syndrome de Jérusalem pour autant, le délire messianique qui s'empare de certains esprits à la première bouffée d'oxygène de la ville sainte.



Alors, si vous êtes dans les parages, ça se passe à Jénine ce dimanche. Lundi, « Lebanon Wins The World Cup » sera à Jérusalem, mardi à Bethléem et mercredi à Ramallah. L'entrée est libre. Bon film et bon festival à toutes et à tous. Par-delà les frontières, bons baisers de Beyrouth à Jérusalem

Et avant que je n'oublie, au cas où vous vous posez la question, nous serons à Jérusalem-Est, capitale de la Palestine, actuellement occupée, annexée et colonisée par Israël, en violation de plusieurs résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies et du droit international. Hasard des coïncidences, heureux bien entendu, une résolution toute fraiche adoptée ce mardi 18 octobre par l'Assemblée plénière de l'Unesco, sur une proposition présentée par sept pays arabes (dont le Liban, l'Egypte, l'Algérie et le Maroc), malgré l'opposition de six pays (dont les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et l'Allemagne), et l'abstention de 26 pays (dont la France), vient encore de nous le rappeler. Dans ce texte composé de 41 points, qui énumère toutes les violations culturelles commises par l'Etat hébreux, Israël est systématiquement désigné par la "Puissance occupante" de Jérusalem-Est