mardi 24 novembre 2015

C’est une tendre et belle histoire de chat-leurre belge (Art.321)


Nous sommes dimanche soir, 22 novembre. Bruxelles est bouclée. Les autorités craignent des attaques multiples, comme celles survenues à Paris le 13. Des opérations de police d’envergure sont en cours. Elles visent les réseaux terroristes. Pour éviter que des fuites d’infos par inadvertance, ne servent les esprits criminels qui rôdent dans la ville, la police fédérale demande aux médias de « respecter le silence radio ». Soit, mais quid des citoyens et quid des réseaux sociaux ?

Brainstorming virtuel pour trouver une idée. D’habitude dans ce genre de contexte, on parle de la pluie et du beau temps. Bon, il fait gris, le froid s’installe en Europe, il va commencer à geler, on a vite fait le tour, rien de passionnant, et après ? Le cœur n’y est pas, même pour la COP21. Désespérés, les internautes belges ont fini par donner leur langue aux chats. Mais justement, hop, elle est là l’idée. Pourquoi ne pas lancer une variante du jeu à chat, ce jeu de poursuite où le poursuivant doit toucher n’importe quelle personne poursuivie, pour s’affranchir de sa mission et inverser les rôles. A vos marques, prêts, partez.

C'est alors que le hashtag #brusselslockdown est lancé et les chatières sont ouvertes. Bilan des courses, pas un chat dans les rues de la capitale belge et tout le monde s’est abstenu d’appeler un chat un chat. Par contre, des hordes de matous et de minous envahirent les réseaux sociaux, au grand bonheur des amoureux des petits félins. Des chats de gouttière, des chats de race, il y avait de tout. Des chats faisant le pitre (la palme d'or !), c’est tout un chapitre. Ce fut la fraternisation, des Siamois côtoyèrent des Persans et des Yorks Chocolats ont été aperçus avec des Orientaux Shorthairs. Je ne vous dis pas, c’était un charabia pas possible. Même le très sérieux quotidien belge francophone Le Soir, a osé illustrer un article intitulé « Menace terroriste à Bruxelles : des opérations policières sont en cours », avec le minois d’un chat bien planqué au-dessous d’une planche, au regard louche, mais aux aguets. Il n’y a pas à dire, cette idée de chat(leurre) a fait beaucoup de bien. Les Belges ont trouvé la parade : avec des chats et un grain, le stress se réduit comme peau de chagrin.

Et pendant ce temps, les chats fourrés au palais de justice, attendaient que les chiens policiers attrapent ces rats au cœur avare et à l’esprit mesquin, pour les mettre derrière les barreaux. Touchée par l’extraordinaire coopération des médias et des citoyens belges, la police fédérale est allée jusqu’à remercier avec beaucoup d’humour aussi « les chats qui nous ont aidé hier soir », en leur offrant un grand bol de croquettes. Sacrés Belges ! Pas de doute, seuls l’amour du prochain, des êtres et des bêtes, les chats et les chiens en tête, et l’humour, dans toutes ses variantes, la satire et le sarcasme en premier, sauveront le monde de la déshumanisation des fanatiques, qui, comme on dit au Liban, ne sont même pas capables de sourire devant un irrésistible « rghif el sokhin », le pain (libanais) chaud, encore moins à cette tendre histoire belge.

Comme on m'a déjà pris pour un Belge, plus d'une fois, et puisque chat échaudé craint l'eau froide, je serai Belge pour le reste du mois. Et pour le prouver voici mon avatar, Chat potté, dont les gros yeux ronds ont fait craquer un ogre et des millions de gens. Ce personnage est inspiré des contes franco-italiens de Giovanni Francesco Straparola et de Charles Perrault. Dans la version adaptée au cinéma par les studios de Steven Spielberg (2004), il est chargé par le roi Harold, qui règne sur le royaume de Fort Fort Lointain, d’assassiner son gendre, Shrek qui vient d’épouser la princesse Fiona. Défait mais gracié, Chat potté se considère dès lors redevable à l’ogre de lui avoir sauvé la vie. Il devra affronter tout seul les gardes venues arrêter son ami. La suite de l’aventure dans Shrek 2, l’un des plus gros succès de l’histoire du cinéma, pour mettre un peu de douceur dans ce monde de brutes.

jeudi 29 octobre 2015

Objectif : zéro poubelle ! Pour sortir de la crise des déchets, au Liban et dans le monde, sans passer par les tocards de politiciens (Art.317)


Samedi 24 octobre 2015.
En Italie (haut), l'oeuvre « Où allons-nous
danser ce soir ? », de Sara Goldschmied
et Eleonora Chirari, exposée au
Museion Bozen-Bolzano, s’est retrouvée
par inadvertance à la poubelle.
Au Liban (bas), les poubelles
se sont retrouvées dans les rues de Beyrouth
à cause des pluies diluviennes et par
négligence des politiciens libanais.

Alors que l’œuvre d’art contemporain, « Où allons-nous danser ce soir ? », de Sara Goldschmied & Eleonora Chirari créée à même un sol rosé avec des bouteilles de champagne, des confettis et une boule à facettes de disco, pour symboliser l’insouciance de l’Italie des années 1980, fut ramassée samedi dernier par les employés chargés du nettoyage du musée d’une ville des Alpes et balancée à la poubelle par inadvertance, le même jour ce 24 octobre, les poubelles libanaises composées de bric et de broc, de détritus et de sacs de toutes les couleurs, étaient éparpillées par négligence dans les rues de cette ville située au pied du Mont-Liban, pour y constituer un pendant trash d’art moderne de l’œuvre italienne, et représenter l’insouciance des dirigeants libanais des années 2000. Et pendant que les pluies diluviennes continuent de s’abattre sur la Méditerranée orientale et que Dame Nature s’amuse à jouer à l’artiste, pour rappeler aux Libanais l’irresponsabilité de leurs dirigeants, le ministre libanais de l'Agriculture, Akram Chehayeb, auteur d’un plan pour sortir de la crise des ordures, a menacé de « tout révéler » aujourd’hui, si le blocage de la situation se perpétue, son collègue de la Santé, Wael Abou Faour, a décidé de réunir des experts pour étudier les risques sanitaires et écologiques du phénomène, et celui de l’Environnement, Mohammad Machnouk, est resté préoccuper par le cadrage de sa photo de Florence qu’il a publiée sur les réseaux sociaux. Mais voyons, pourquoi se presser Messieurs, nous ne sommes qu’au 4e mois de la crise et il n’y aurait que seulement 400 millions de kilogrammes de déchets grand maximum qui putréfient aux quatre coins du pays où coulaient jadis le lait et le miel ? Eh rou7o tommo 7alkoun ya chabeb.

Bon, oublions les tocards de politiciens, au Liban et ailleurs, vous pourrez les juger aux prochaines élections. Ne vous inquiétez pas, il y en aura toujours, même au pays du Cèdre. Il est temps de prendre acte. Le Liban est aujourd’hui une vaste zone sinistrée (comme le prouvent les images depuis ce weekend), on ne peut pas compter sur les dirigeants libanais (encore moins sur les fantômes du Parlement comme Gilberte Zouein, dont personne ne connait le timbre de sa voix, en 10 ans de mandat svp, ou le dénommé Okab Sakr, il parait qu’on a pu capter sa présence sur un cliché photographique pris quelque part entre Istanbul et Moscou!), et nous devons encore prévoir le pire (sur tous les plans, politique, sociale et écologique). Ce triple constat nous impose d’agir sur le plan individuel pour circonscrire le mieux possible cette crise des déchets. Les actions proposées dans cet article, sont inspirées de la crise des ordures au Liban, mais ont évidemment un caractère universel. Avant d’aller polluer la planète Mars, on doit se fixer UN objectif terrestre, zéro poubelle, que nous pourrons réellement atteindre par l’adoption de règles simples à mettre en œuvre. Mais, je vous préviens, c’est d'une véritable révolution de nos modes de consommation qu’il s’agira.

1. L’USAGE DES CABAS ET DES SACS RÉUTILISABLES POUR FAIRE LES COURSES ET DU SHOPPING, AINSI QU’UNE TAXATION LOURDE DES SACS JETABLES

Pour y parvenir, il faut agir à trois niveaux. Au niveau des INDIVIDUS, c’est simple, il faut aller systématiquement avec son cabas, son panier ou sa poussette pour faire ses courses. Revenir d’un marché, d’un supermarché ou d’un hypermarché, avec des sacs en plastique doit devenir quelque chose d’irresponsable et de ringard, sujet de raillerie dans la rue. Cela limitera le pullulement de ces produits dans la nature et dans le ventre des pauvres dauphins et des tortues qui daignent encore s’aventurer sur nos côtes et notre littoral. Le comble en ces temps modernes, consiste à mettre tous les produits achetés dans une grande surface, dans des sacs en plastique qu’on dispose dans un caddie, pour aller ensuite dans le parking les entreposer dans sa voiture, avant de les décharger enfin dans sa cuisine. Un procédé absurde quand on pense qu’on peut faire la même chose avec trois cabas sous le bras et deux bacs dans sa voiture, le tout, réutilisable !

Et comme on ne peut pas compter sur le sens des responsabilités de tout le monde, l’ETAT doit intervenir et taxer ces contenants qu’on récupère dans les grandes surfaces, mais aussi chez les marchands de fruits et légumes. Nous devons en finir une fois pour toutes avec la gratuité. En Europe, les sacs en plastique sont déjà payants, pas encore au Liban. Ceci doit cesser. Mais, même en Europe, il n'y a pas de quoi pavoiser. Non mais il faut être technocrates, pour croire qu’à 10 centimes, on dissuade les Européens d’en prendre à la caisse ! Il n'y a qu'à faire un tour dans les grandes surfaces pour s'en rendre compte. La solution ne réside absolument pas dans les sacs jetables biodégradables, dont la fabrication est une source de pollution et qui se retrouvent eux aussi dans la nature après un usage unique. Il est évident, le prix de ces contenants, doit être exorbitant. A 1 euros/dollars le sac en plastique, tout le monde viendrait avec son cabas

Les COMMERÇANTS aussi doivent mettre la main à la pâte. Pour les marchands de fruits et légumes par exemple, grands consommateurs de sacs en plastique dans tous les pays du monde, Europe incluse (après les courses, les gens en Europe comme au Liban, rentrent à chaque fois avec des dizaines de ces sacs jetables, qui ne sont toujours pas payants, ni en Orient ni en Occident !), on peut imaginer un système avec de petits bacs pour les pesées, qu’on laisse sur place, les fruits et légumes achetés sont déversés dans les cabas, paniers et poussettes. C’est à peu près ce qu’on faisait autrefois partout dans le monde. Alors de deux choses l'une: soit les commerçants le feront de leur propre initiative, soit il revient aux Etats, en Orient comme en Occident, d'imposer le bannissement des sacs en plastique aux rayons fruits et légumes et l'adoption de la pratique de la pesée dans des bacs. Pire encore, les images de fin de marché en France sont scandaleuses. Il est inadmissible de voir toujours en 2015, autant de cageots en bois et en carton qui partent à la poubelle, alors que de tels contenants peuvent être réutilisés. Sans l'intervention des Etats, ces pratiques de gaspillage peuvent perdurer longtemps. Une taxation lourde des cageots dès la fabrication, obligera les marchands de fruits et légumes à réutiliser ces contenants.

Le même raisonnement peut s’appliquer aussi au SHOPPING où les sacs sont plus épais, donc beaucoup plus polluants pour l’environnement. Encore une fois, la meilleure façon de ne pas polluer l’environnement, en Occident comme en Orient, ce n’est pas de recycler les ordures, ou d'avoir des sacs biodégradables ou fabriqués à partir de produits recyclés, mais de réduire le volume de ses déchets, produits biodégradables et recyclés compris. Pour les sacs de shopping, les prix doivent être encore plus dissuasifs. 5 euros/dollars le sac. Chers ? Et alors ? Ce n’est pas la fin du monde d’aller faire du shopping avec un grand sac de plage en toile ! Il suffit d’y penser avant de s’y rendre. Oui, c’est osé. Mais, il faut bien comprendre, on ne peut plus continuer à vivre sur notre planète, unique dans son genre, avec autant d’insouciance et d’égoïsme, voire de crétinisme caractérisé par un manque d’intelligence flagrant dans nos modes de consommation d’aujourd’hui.

2. LE RECOURS A SES PROPRES RÉCIPIENTS EN PLASTIQUE LORS DES ACHATS DE TOUS LES PRODUITS FRAIS 

Cela implique d’aller chez le boucher, le traiteur ou le snack du coin, avec ses propres récipients -je vous ai prévenu, c’est d'une révolution des modes de consommation qu'il s'agira- avec le bénéfice immense de limiter la production de déchets. A ce propos, anecdote très instructive. Je me trouvais un jour à Beyrouth dans un supermarché pour acheter rabtit khebez. Je rappelle à tout hasard, que les pains libanais sont vendus dans un sac, qui en contient une demi-douzaine ou un peu plus. Eh bien figurez-vous que la jeune fille de la caisse voulait, tenez-vous bien, me mettre le paquet de pains, déjà emballé dans un sac en plastique transparent, dans un autre sac en plastique, qui lui, est opaque. Nuance ! Je l’ai regardé abasourdi par cette situation tragicomique en lui disant : « non mais, pourquoi faire ? » Elle me répondit avec un sourire débile : « ah, mais c’est plus joli ».  

Enfin, il faut oser et surtout choisir, soit d’aller chez les commerçants avec des cabas et des tupperwares, soit de s'habituer à rouler, marcher et vivre au milieu de nos propres poubelles ! Règle générale : éviter les produits dans des barquettes jetables en plastique ou en polystyrène et emballées par du cellophane. Mettre le poulet grillé et les pommes de terre dans une boite en plastique réutilisable ramenée de chez soi, évitera des sacs trempés par le gras et leur putréfaction ultérieure à l’air libre, et leur léchage par les rongeurs. Idem pour les viandes crues, les poissons, les poulets, les plats cuisinés, les salades préparées, le hoummous, les falafels, etc. Les fromages (et d’une manière générale tous les produits laitiers, labné compris) et la charcuterie (jambon, etc.) peuvent aussi être récupérés à la découpe dans ses propres récipients, évitant les produits déjà emballés, et du coup, le gaspillage d’emballages. Il suffit de présenter les tickets de paiement à la caisse. On peut même imaginer comme une ardoise, où l’on colle tous les tickets au fur et à mesure des pesées. A la caisse, le paiement ne sera que plus rapide. Cela demande naturellement la coopération des commerçants ou des décrets des Etats imposants de tels gestes écologiques. En tout cas, précision utile, tous ces récipients sont lavables en machine ! Avec un geste aussi simple, nous produirons ZÉRO emballage à jeter, en ce qui concerne les produits frais. Cela demande un petit effort et exige d’être audacieux, mais le résultat est extraordinaire. La règle générale à Beyrouth comme à Paris ou à Stockholm, éviter à tout prix les emballages car n’oublions pas encore une fois, contrairement à ce qu'une majorité d'Occidentaux croient en se donnant bonne conscience, le geste le plus écologique consiste à réduire ses déchets plutôt qu’à les recycler.

3. LE TRI ET LE STOCKAGE DES PRODUITS A RECYCLER CHEZ SOI 

Quand on sait que même dans un pays développé comme la France, malgré l’école obligatoire et le matraquage médiatique, la moitié des Français ne trient pas leurs déchets systématiquement et que les jeunes forment la catégorie d’âge qui recycle le moins, cela laisse présager le pire pour des pays en voie de développement comme le Liban où jamais aucune campagne sérieuse n'a été menée. En tout cas, quand on a la chance de se trouver dans un pays où il existe une filière bien organisée pour le recyclage, c’est un crime contre la Terre de ne pas trier ses ordures, alors que les bacs se trouvent en bas de son immeuble ou de sa maison.

Pour le Liban et certains pays en voie de développement, il n’y a pas encore une filière de recyclage digne de ce nom. Alors, nous devons instaurer un système D, et ceci jusqu’à nouvel ordre, la mise en œuvre d’un plan B, pour une gestion des ordures ménagères selon les normes en vigueur dans les pays développés. Il faut trier et stocker les produits recyclables chez soi. On pourra à tout moment, soit les déposer dans une société qui fait du recyclage, soit appeler une société de recyclage qui accepte de passer régulièrement récupérer les emballages. On peut faire le tri dans son propre jardin, pour ceux qui vivent dans une maison ou possèdent une résidence secondaire, ou dans son immeuble, dans un coin, une pièce ou une cour, pour les autres. Pour une optimisation de la place, il faut réduire le volume des plastiques, des canettes, des conserves et des cartons, en les écrasant.

Trier doit être la 2e obsession de tous celles et ceux qui sont soucieux de l’environnement et d’une bonne gestion des déchets. On peut dans le but de mieux s’organiser, réunir la copropriété de son immeuble, ou le pâté de maisons, et mettre en place un système à plusieurs : pour le tri, mais aussi pour le dépôt des emballages ou leur récupération par les entreprises de recyclage. Sachez au passage, détail qui a son importance, que les produits recyclables se monnaient et chèrement svp pour l'aluminium et certains plastiques (chaises). Donc, le tri et le recyclage peuvent devenir une source de revenus non négligeable pour une copropriété au Liban ou dans les pays en voie de développement, qui peut couvrir largement les charges pour l'entretien de l'immeuble.

4. METTRE EN PLACE UN « SYSTÈME D » DE RECYCLAGE

Jusqu’à la mise en œuvre d’un plan B, pour organiser la filière de recyclage au Liban, mais aussi dans tout pays en voie de développement qui n’en a pas, il faut pratiquer le « système D », D pour débrouillardise. Pour commencer le plus simplement au monde, chaque MUNICIPALITÉ doit mettre à disposition des citoyens, une liste régulièrement mise à jour, des sociétés de recyclage qui se trouvent dans le caza dont elle dépend. Un tract peut être distribué à tous les foyers pour les en informer, comme pour les conseiller en matière de tri. Et sur ce dernier point, tout le monde doit être de la partie. Le ministre de l'Environnement a mieux à faire à Beyrouth qu'à Florence. Idem pour le Hezbollah, il sera plus utile à Baalbek qu'à Damas.

Filière de recyclage à Laax, une commune du canton
des Grisons en Suisse, où les habitants amènent eux-mêmes
les produits recyclables au centre de tri.
Sur les 4 photos de droite, on trouve les compartiments
réservés aux papiers, aux cartons, aux bouteilles en
plastique et aux objets métalliques.


De plus, chaque municipalité doit, de sa propre initiative ou obligée par l’Etat sous peine d’amende (eh oui c’est comme ça que les pays développés fonctionnent), mettre à disposition de la population, des lieux où les citoyens pourront venir déposer tous les produits recyclables, à sa charge ensuite, de les transporter vers les sociétés de recyclage du caza, choisies d'une façon transparente, soit dit au passage. Ce n’est pas compliqué, les municipalités peuvent le faire d’une manière définitive, ou même d’une manière temporaire en attendant la mise en œuvre du plan B, qui mettra de toute façon, encore beaucoup de temps pour voir le jour ou être pleinement opérationnel. Et au lieu que les responsables municipaux râlent sur le vol par l’Etat libanais d’une partie de leurs taxes, afin de financer la gestion des ordures par Sukleen (dont le contrat s'est arrêté le 17 juillet 2015), des doléances relayées naïvement par des activistes de la société civile qui connaissent mal le fonctionnement opaque des municipalités libanaises, ils devraient se débrouiller pour prendre leur part de responsabilités et circonscrire la crise des déchets dans leurs communes avec les moyens du bord. Les images de ces trois derniers mois, sont une honte non seulement pour les dirigeants libanais, ainsi que pour tous les partis politiques représentés au Parlement libanais, mais aussi pour toutes les municipalités libanaises, celle de Beyrouth en tête, la capitale étant la ville la plus touchée par la crise des déchets ! Cela coutera beaucoup moins cher, de mettre en place une filière de recyclage avec l’esprit « système D », que de s’engager dans des projets farfelus.

Il y a toujours un emplacement pour n’importe
quel produit recyclable. Laax / Grisons (Suisse)

Et que les responsables municipaux sachent au passage, que c’est exactement de cette manière qu’on procède en SUISSE -la Suisse authentique, pas la Suisse d'Orient, une contrefaçon où l’on ne fait que pavoiser à coups de narguilé, que l'on peut skier et nager le même jour- comme le montrent la série de photos que des amis suisses de la région de Laax, une commune du canton des Grisons, m'ont envoyées et que je mets gracieusement à la disposition des (ir)responsables libanais, désolé de les déranger dans leur hibernation, notamment à notre touriste de Florence et aux bloqueurs de tout poil du plan B, que j'ai dénoncés dans mon dernier article. Comme on le voit bien sur ces photos, un petit terrain suffit pour y construire un simple hangar, le compartimenter, et rajouter quelques bennes et de grands sacs réutilisables (bleus) -pour le papier, les cartons, les bouteilles en plastique, le verre, le métal, le bois, le textile, les batteries, etc.- et le tour est joué ! Evidemment, il revient après aux citoyens d’assumer leur part de responsabilités, en triant les déchets chez eux, et en les ramenant comme les Suisses vers ces zones municipales. Mais enfin, il faudra bien choisir, soit nous deviendrons vraiment la Suisse de l’Orient, soit nous n’avons qu’à rester des imposteurs.
 
Recyclage du textile et du bois
à Laax / Grisons (Suisse)

Dans ce but, les municipalités (qui ne sont pas à plaindre, loin de là, au moins dans les zones où la souveraineté libanaise est exercée, taxes et factures sont payées, à Beyrouth et dans la région du Mont-Liban justement !), doivent consacrer dorénavant et jusqu’à nouvel ordre, la priorité financière au dossier des ordures, au lieu de continuer à inventer sans cesse des travaux publics et d’embellissement douteux et inutiles : élargissement de routes et construction de murs en pierres sèches, en trompe-l’œil d'ailleurs car en réalité ces murs sont remplis de béton (l’obsession des villages libanais), mutilation des arbres (grand dada de la municipalité de Beyrouth), création d’une autoroute au pied des lits et d’un parking dans l’un des rares jardins publics de la capitale (deux délires de la municipalité de Beyrouth dans le quartier d’Achrafieh), j’en passe et des meilleurs. Et avant que je n'oublie, comme les produits recyclables se monnaient, une filière de recyclage, surtout sans ramassage individuel des ordures, peut ne rien couter aux citoyens (contrairement à ce que les vautours des ordures veulent faire croire), surtout dans des pays en voie de développement aux ressources insuffisantes en matières premières. Enfin, un seul mot d'ordre, au travail. Et que cessent pour une fois, la rouspétance, la fainéantise, l’hypocrisie, l’abrutissement, la mauvaise foi et les magouilles de certains !

5. L’INCONTOURNABLE COMPOST

Bon, place maintenant  à la détente et aux trois dernières parties que je préfère. Donc, si on suit le programme énoncé précédemment, il reste évidemment les déchets végétaux, notamment les épluchures des fruits et des légumes. Tout le monde a déjà entendu parler de COMPOST. Beaucoup croit que c’est difficile à faire, alors que c’est à la portée de tous. Disons pour commencer que tous les végétaux morts se dégradent avec le temps, quelques soient les conditions environnementales. Cependant, la mise en compost, sous certaines conditions, a comme objectif de permettre une dégradation optimale des végétaux, afin d’obtenir une matière riche et équilibrée, qui peut servir de terreau et d’engrais pour les plantes. Maintenant que vous connaissez le principe, passons à la pratique. Alors, voyons les détails.

. Emplacement : au fond d’un jardin.
. A faire : y mettre tous vos végétaux. Déduction, un compost ne contient que des produits d’origine végétale.
. Seule exception : les coquilles d’œuf. Mieux vaut les broyer avant. En général, on ne met pas les agrumes. Mais bon, au point où nous en sommes au Liban !
. A oublier : le noyau d’avocat. A moins de donner votre compost en héritage.
. Règle de base : il est préférable de découper les végétaux en petits morceaux pour accélérer la fermentation.
. Matériaux : on peut acheter un contenant spécialement conçu pour cela. Pas évident d’en trouver au Liban. Aucun souci, vous pouvez construire un cubage avec des morceaux de bois. Comme des lego, un marteau et des clous, c’est tout ce qu’il vous faut. Vous pouvez aussi acheter un conteneur en plastique, comme un petit réservoir d’eau par exemple. Pas la peine de voir trop grand, car il y a une réduction de volume importante, par absorption et évaporation de l’eau des végétaux.
. Capacité : un 250 l est largement suffisant pour un foyer. Si vous voulez y mettre les feuilles des arbres et l’herbe, prévoyez plus grand, 1 000 l par exemple.
. Nombre : il en faut deux en général. Un en cours d’usage, l’autre en cours de fermentation.
. Entretien : Pas grand-chose. Enfin, si, pour une bonne fermentation, veillez sur ces deux points. D’un côté, il est important que le compost reste humide. Au début et s’il est bien alimenté, il le sera. Mais en été, il risque de se dessécher vite. Alors, il ne faut pas hésiter à verser un arrosoir d’eau de temps en temps. D’un autre côté, il est important que le compost reste aérer. L’idéal c’est de retourner les végétaux de temps en temps avec une fourche. Une humidité suffisante et une bonne aération, c’est le secret d’un bon compost, qui ne sentira pas mauvais de surcroit. Eh oui, les mauvaises odeurs sont dues à une fermentation anaérobique, sans oxygène.
. Précaution dans la construction : Coupez le fond de votre contenant car la fermentation des aliments produits du jus, qui doit s’évacuer. Faites beaucoup de trous sur les côtés, pour favoriser l’aération (pour éviter la visite nocturne de quelques hôtes indésirables, installer une moustiquaire métallique). Et prévoyez évidemment un couvercle.
. Délai : 3 à 6 mois, selon les conditions. Inutile de vous dire qu’avec un peu de compost, vous verrez vos plantes pousser à l’œil nu et vous boosterez votre potager si vous en avez un, et d'une manière bio svp. Allez, à votre santé !

6. ET QUE FAIRE DES RESTES ALIMENTAIRES ?

Vous pourrez nourrir les chats et les chiens errants si vous n'arrivez pas à contenir votre amour pour les bêtes, les corbeaux si vous en voyez encore, et renards, chacals, hyènes et loups si vous vous trouvez dans certaines zones très reculées et si les mâles homos libanus ne les ont pas tué déjà. Vous pourrez aussi prendre un porc en élevage, ça mange tout. C’est un omnivore comme les cochons d’humains. Bon, j’avoue que ce n’est pas propre. Vous risquez de transformer votre petit Versailles en une porcherie. En plus, la viande de porc n’a pas la cote au Liban. Les Libanais musulmans n’en mangent pas, les Libanais chrétiens s’en méfient et les Libanais laïcs s'en foutent. Et pourtant, les Français trouvent que tout est bon dans le cochon. Les travers de porc marinés et grillés sont un régal, et une choucroute sans charcuterie c’est comme un tabboulé à l’huile de tournesol.

Sérieux, si vous avez un jardin, je ne peux que vous conseiller les poules. Il parait que ça se développe même en ville et c’est très trendy. Bon, plutôt à Berlin qu’à Beyrouth. Pas besoin d'autorisation spéciale, sauf si vous comptez prendre en charge plusieurs dizaines d'animaux. Les poules sont moins connes qu’elles n’y paraissent, surtout chapeautées par un coq. Ce mâle est utile à la vie du poulailler, mais pas indispensable. A part les cocoricos dépaysant du coq, les poules mangent les restes et vous fabriquent des œufs bio, si leur alimentation l’est. C'est un animal omnivore. A éviter les pommes de terre crues et les poireaux. C’est dans la pure logique de Lavoisier : rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. C'est magique. Moi, j’adore ce principe. Et dans les aliments, l’œuf est une merveille de la nature. Riche en protéines (deux œufs valent un bon morceau de viande, qui, trop grillée est cancérigène, comme l’a rappelé l’OMS il y a deux jours) et contient une grand partie des vitamines et des minéraux dont on a besoin. Ne vous inquiétez pas, il y a des réservoirs d’une grande autonomie pour les graines et l’eau. Seuls bémols, il faut s’en occuper un peu quand même (car je rappelle que ce sont des êtres vivants), et surtout, nettoyer le poulailler. Ah, ne rechignez pas, deux fois par mois, on ramasse la paille souillée et les déchets solides, qui iront sur le compost ou feront le bonheur des arbres d'un verger ou les plantes d'un potage, on en remet de la neuve, et le tour est joué en moins d’un quart d’heure. Un bon poulailler ne sent pas ! On en trouve tout fait. Et n’oubliez pas, comme on a convenu, les coquilles d’œuf partent sur le compost et la boucle est bouclée. J’ignore toujours si l’œuf est venu avant la poule ou si c’est l’inverse. Mais une chose est sûre, vous avez zéro poubelle. Enfin presque. Et n'oubliez pas, poulaillers et composts peuvent être gérés d'une manière collective. 

7. MESURES SUPPLÉMENTAIRES POUR ATTEINDRE L’OBJECTIF « ZÉRO POUBELLE »
 

- Toutes les habitudes de consommation doivent être revues et corrigées de nos jours. C’est ce que j’appelle "consommer intelligemment". Règle générale en faisant les courses : privilégiez toujours le grand format au petit format. C’est sympa les yaourts individualisés à 125 g le pot, mais c’est mieux un grand seau de 1 kg. Idem pour les eaux minérales, céréales du petit déjeuner, boissons, jus, lait, bière, canettes (il y en a de 15 cl !), chips, gel douche, shampoing, lessive, produit vaisselle, PQ, etc. 

- Les morceaux de sucre, joliment emballés, ainsi que les sachets de sucre, sont à bannir. Inutiles et polluants. Mieux maux acheter un paquet de 100 mouchoirs, qu'un paquet de 10 étuis contenant chacun 10 mouchoirs. C'est pratique les biscuits Speculoos emballés individuellement, pour accompagner un café, mais là aussi, mieux vaux acheter un grand paquet qu'on stocke après ouverture dans un bocal fermé hermétiquement. Ils garderont leur caractère croquant, sans gaspillage d'emballage.

- Les boulangers libanais devraient revenir aux habitudes commerciales d’autant, la vente du pain à la pièce (rghif) et sans emballage, aux consommateurs de venir avec leur propre sac en plastique rétilisable ou en tissu, lavable aussi.

- Les pizzérias, comme d’autres restaurateurs de produits à emporter, devraient limiter le gaspillage à outrance d’emballages et de sachets divers. Un carton de pizza peut servir plus d’une fois. Il suffit que le livreur transporte la pizza à livrer sur une plaque en inox, lavable. Ainsi, le carton de la pizza, pourra servir plusieurs fois. Sur place, il n’aura qu’à la déposer une plaque de four ou sur une planche en bois. Ketchup, moutarde et huile pimentée, mais enfin, on a tous ces produits chez soi. Alors, dès la commande, il faut préciser, vous n’en voulez pas, ni de ces condiments, ni des couverts en plastique.

- Nespresso est un produit qui est loin d’être indispensable pour l’humanité. Gaspiller 1,7 g d’aluminium pour consommer un faux espresso, est un acte de mauvais goût, égoïste et polluant, quand on sait qu’on peut se faire des dizaines de vrais expressos italiens pour quelques grammes d'un sachet de café moulu.

- Dans les chaines de café, comme Starbucks ou Costa, exigez des tasses en porcelaine et non de gobelets jetables, fournis par défaut, même pour une consommation sur place.

- Revenir au torchon et aux mouchoirs en tissu, au lieu d’abuser de papiers absorbants, d’essuie-tout, de sopalin et de mouchoirs en papier. Les premiers sont lavables en machine, les seconds encombrent nos poubelles. En plus, on pourra faire des économies. Mais que demande le peuple de plus ?

- Non mais franchement, il faut en finir avec l’habitude superflue du papier cadeau, dont la brève durée de vie a des conséquences désastreuses sur l’environnement : des milliers et des milliers d’arbres y sont sacrifiés chaque année dans le monde, et de tonnes et de tonnes de papiers se retrouvent dans les poubelles. A l’approche des fêtes de fin d’année, ce n’est pas un luxe d’y réfléchir un peu sur ce genre de foutaises. Osons envelopper les cadeaux avec de beaux tissus réutilisables ! Faisons du papier cadeau quelque chose d'exceptionnel. Et croyez-moi, ce n’est pas Jésus qui vous le reprochera. « Marthe, Marthe, tu t'inquiètes et tu t'agites pour bien des choses. Une seule est nécessaire », faire plaisir tout en prenant soin de la Planète bleue. Et n'oubliez pas, comme l’habit ne fait pas le moine, le papier cadeau ne fait pas le cadeau !

- Il serait intéressant de remettre le bidet à l’honneur, ça permettra d’économiser des tonnes de PQ, de tampons et de serviettes hygiéniques à l’année, mais aussi d’assurer une meilleure hygiène corporelle. Au passage, au Liban, comme dans d’autres zones méditerranéennes, on ne jette pas les papiers toilettes dans les cuvettes mais dans une poubelle, notamment dans les zones rurales où le tout-à-l’égout n’existe pas.

- Toute campagne pour circonscrire la crise des déchets au Liban ne doit évidemment pas oublier les réfugiés, syriens et palestiniens. Même s'ils n'ont pas la tête à cela, ils constituent tout de même 33 % de la population générale. Et comme tout le monde produit des déchets, même un réfugié, de ce fait, on est tous responsables de la situation, réfugiés compris.

- Les prêtres, les imams et les rabbins dans nos contrées rendraient un énorme service au Moyen-Orient et à Dieu, en parlant plus de paradis et d’écologie, que d’enfer et de politique. Leurs sermons devraient insister sur le fait que la lutte contre le gaspillage des ressources de la Terre est forcément un acte béni du Créateur.

EN GUISE DE CONCLUSION

Il faut vraiment prendre conscience que nous sommes dans un sale pétrin, au Liban plus qu’ailleurs. Avec des dirigeants tocards, il va falloir beaucoup d’efforts et d'imagination pour s’en sortir. Près de 6 millions d’habitants, réfugiés compris, sur 10 452 km², c’est l’une des densités les plus élevés au monde. Nous n’avons pas le choix : soit on entame une révolution de notre manière de consommer, soit nous allons tous être submergés par nos poubelles

Mon grand différend avec certains activistes de la société civile, réside dans le fait, qu’ils ont cherché à tout mettre sur le dos des dirigeants libanais, en excluant certains (ceux du Hezbollah), à faire des revendications incohérentes et à recourir à des actions illégales, le tout en dédouanant les citoyens dans cette crise, dans une sorte d’amnistie générale. Je fais partie de ceux qui croient que ces derniers sont non seulement responsables de leurs destins et de ce qui leur arrive, mais en plus, ils détiennent réellement les rênes du pouvoir, à condition qu'ils sachent comment s’en servir.

Nous pouvons agir sur la source du problème comme sur les décideurs qui sont censés gérer nos problèmes. Dans un long article consacré à la crise des ordures, j’ai détaillé comment nous en sommes arrivés là et j’ai donné quelques pistes réalistes pour s’en sortir. Dans mon dernier article, j’ai établi la liste des responsabilités, d’une manière chronologique, pour expliquer aux Libanais pourquoi depuis la mi-juillet la situation va de mal en pis. Sur l’importance des responsabilités de chacun, mieux vaut zapper, au point où nous en sommes, ça n’a plus beaucoup d’importance. Il faut circonscrire la crise des déchets.

Pour être positif, disons que toute crise est une opportunité pour améliorer les choses. Les images choquantes et honteuses, qu’on voit depuis trois mois, avec l’apothéose de l’éparpillement des ordures ménagères par les pluies diluviennes, dans les rues de Beyrouth, nous placent à la croisée des chemins et nous imposent de réagir avec détermination pour sortir de ce cauchemar qui n’a que trop duré. Nous avons aujourd’hui le choix, non seulement de résoudre cette crise d’une manière intelligente, mais aussi une occasion en or pour profiter de cette grave épreuve et devenir plus écologiques. Il faut oser le changement, cette révolution dans nos modes de consommation. C’est valable au Liban, où la crise des déchets est aigüe, mais aussi pour le reste du monde, où la crise des ordures est latente. Toutes ces mesures énoncées dans le présent article, sont faciles à mettre en œuvre et ne dépendent pas de l’Etat, en partie, mais de la bonne volonté de tout un chacun. S’il est difficile d’arriver à « zéro poubelle » de nos jours, il faut tout mettre en œuvre pour tendre vers ce noble objectif, qui permettra de préserver les ressources de la Planète bleue et de lutter efficacement  contre la pollution et le réchauffement climatique de cette belle perle de l'Univers.

Réf.