samedi 17 septembre 2016

Dernier acte de la rixe de Sisco : le verdict et les leçons (Art.388)


Il est toujours intéressant de revenir sur les événements. Souvenez-vous, alors que le feuilleton de l’été, « Le burkini », occupait la France, il y a eu une rixe sur une plage de Sisco en Corse dans l’après-midi du 13 août, entre un groupe de baigneurs marocains, une douzaine d'individus de la même famille, et un groupe de natifs corses, une centaine de personnes au paroxysme de l’affrontement. Il n’a fallu qu’un mois à la justice française pour établir les faits et les responsabilités. Et encore, le procès devait avoir lieu quelques jours seulement après les faits, mais il a été reporté à la demande des avocats de la famille maghrébine. En tout cas, la justice vient de rendre son verdict le vendredi 16 septembre à l’aube, concernant les cinq personnes poursuivies, au terme de 12 heures d'audience, au moment même où les arrêtés anti-burkini prenaient fin. L’enquête et le procès furent très instructifs, comme le montrent les cinq éléments suivants.

1. Les éléments déclencheurs : des hommes maghrébins qui s’approprient une plage et des femmes maghrébines qui se baignent en mer habillées.

2. Le casus belli : la prise de « photos » par un touriste belge, puis par un jeune corse, qui a irrité la famille maghrébine. « Pas de photos ici, dégage ou sinon je monte ! »

3. L’étincelle : un échange entre Mustapha, Marocain, 33 ans, « On n'est pas des singes ! », et Jerry, Corse, 18 ans, « Ferme ta gueule ! »

4. Le basculement : il s’opère quand Mustapha se sert d’un couteau contre Jerry (le jeune échappe au coup qui le visait, mais il sera frappé et blessé au visage) et lorsqu’un des Maghrébins lance un harpon contre le père de ce dernier (qui sera blessé au thorax). 

5. L’huile sur le feu : une foule corse qui veut en découdre avec la famille maghrébine, une amie de Jerry qui affirme avoir entendu les Maghrébins dire « on va engrosser vos femmes et vos filles », les « Allah wou akbar », des jets de pierre et des coups de poing mutuels, des pneus de voitures de villageois corses crevés, un coup de pied à la tête d’un des frères maghrébins alors qu’il est au sol, un coup de poing à l’un des frères maghrébins blessé alors qu’il est sur une civière (donné parce que celui-ci faisait des « signes d’égorgement »!), des voitures de la famille maghrébine incendiées, Mustapha qui tente de prendre le pistolet d’un gendarme, etc.  

Dans ce sillage, il est intéressant de revenir aussi sur la couverture médiatique de l’incident. Quelques heures après les faits, Edwy Plenel était tout fier d’annoncer sur Twitter que « l’enquête de Mediapart contredit le récit dominant des affrontements de Sisco » rédigé d’après le témoignage d’une jeune fille ayant assisté à la scène, mais du côté corse. En réalité, l’enquête du site Mediapart fut construite d’après le témoignage de « l’un des hommes impliqués dans les affrontements », l’un des frères maghrébins en réalité. L’ironie de l’histoire c’est que la version de Mediapart a été aussitôt contredite par le procureur de la République et plus tard, avant-hier, par le tribunal correctionnel de Bastia. Eh oui, la recherche de la vérité ne passe pas forcément par la course au scoop et la défense aveugle des "gentils immigrés" contre les "méchants français". Les Corses impliqués dans cette affaire ne se sont pas comportés comme des anges, encore moins les Marocains ! Si chacun avait fait ce qu’il avait à faire, sur la plage et dans les médias, sans paranoïa et provocation, loin de l’esprit de caïd et de domination, avec discrétion et professionnalisme, tout serait allé pour le mieux dans le meilleur des mondes.

A défaut, d’un côté, Mustapha Benhaddou a été condamné à la peine la plus lourde, deux ans de prison ferme, et ses deux frères à six mois de prison avec sursis, et de l’autre côté, les deux Corses violents ont écopé respectivement de huit et de douze mois de prison avec sursis.

Voilà un fait divers somme toute banal, qui a pris des proportions inimaginables et qui aurait pu se terminer dans un grand drame insulaire et national, à cause de la stupidité d’une poignée d’hommes et de femmes. Justice a été rendue et rapidement. Deux éléments essentiels d’un Etat de droit. C'est la principale leçon de ce procès : personne n'est au-dessus de la loi en France, que l'on soit Maghrébin ou Corse. La justice française a pour la énième fois opposé une fin de non-recevoir à la
« dérive communautaire » des esprits et de la société. On ne peut que s'en féliciter.